Dans les coulisses de Mlle Bottine : entrevue exclusive 

Avec Mlle Bottine, les productions La Fête nous offrent une nouvelle aventure cinématographique qui promet de captiver toutes les générations. Entre anecdotes de tournage, sources inspirations et réflexions sur le processus créatif, cette entrevue exclusive avec Dominic James, scénariste et producteur, vous dévoile les coulisses et les moments marquants de cette belle production.

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Tapis rouge du film Mlle Bottine - Cinoche.com

Tapis rouge du film Mlle Bottine - Cinoche.com

Photographe: Patrick Lamarche

Qu'est-ce qui vous a inspiré l'idée de ce film?

« Après avoir repris les productions La Fête, on avait fait un meeting avec notre équipe créative pour discuter des idées dans les Contes pour tous qu’on aimerait développer pour faire de nouveaux films. Ni moi ni Rock (Demers) n’avions l’intention de faire des « remakes ». Je n’aime pas l’idée de refaire le même film deux fois parce que le film existe dans une époque et traite de sujets et de thématiques en lien avec celle-ci. Je pense qu’un film doit apporter quelque chose de nouveau et nous faire réfléchir à des sujets actuels. Mais parfois, dans l’idée de base, il y a un élément qui nous inspire. Ce fut le cas avec Mlle Bottine, qui tire son inspiration de Bach et Bottine. »

Combien de temps a-t-il fallu pour créer le film du début à la fin?

« Eh bien, si l’on calcule depuis l’inspiration initiale de l’histoire jusqu’à la sortie du film au cinéma, on parle de presque 5 ans ! Christine Doyon (la sœur de Margot), qui est dans l’équipe créative de La Fête, était vraiment accro à l’idée de développer Mlle Bottine, et on a rapidement établi les bases de l’histoire ensemble. Ensuite, la véritable écriture du scénario du film a eu lieu en 2020, pendant la première année de la pandémie. Il faut compter au moins une année complète en écriture et plusieurs années pour obtenir le financement nécessaire. Ensuite, on ajoute une autre année pour la préparation, le tournage et la postproduction du film. C’est un long voyage. »

Y a-t-il des éléments du film inspirés de faits réels ou de souvenirs d’enfance?

« Oui, ça fait un peu partie du processus d’écriture de s’inspirer, consciemment ou inconsciemment, de souvenirs d’enfance ou de faits réels. En même temps, on essaie beaucoup de laisser nos personnages prendre vie et nous dicter les grandes lignes de leurs histoires. Philippe Bloom est un personnage qui s’est isolé après avoir connu des difficultés et qui est à la recherche d’inspiration. En quelque sorte, il cherche à entendre sa petite voix intérieure qu’il n’entend plus. Et puis, Simone arrive dans sa vie et l’aide à se réouvrir aux autres et, surtout, à se reconnecter avec l’enfant qui est caché en lui. Ceci est certainement issu de mon expérience personnelle. Je pense que nos enfants peuvent nous inspirer plus souvent qu’on le pense et nous aider à nous reconnecter avec l’enfant qui sommeille en nous. »

Pourquoi avez-vous choisi ce titre pour le film?

« Bonne question ! Personne ne connaît vraiment la réponse. À vrai dire, le titre Mlle Bottine est un clin d'œil à l’opéra Madame Butterfly. Je cherchais un titre qui aurait un lien avec l’opéra, et puis, un après-midi, alors que je marchais sur une route de campagne près de chez moi, je pensais aux titres des grands classiques de l’opéra. C’est là que Madame Butterfly m’est venu à l’esprit… et de fil en aiguille, j’ai pensé à Mlle Bottine. Évidemment, Bottine, c’est le nom de la moufette, et donc Simone est Mlle Bottine. »

Y a-t-il eu des changements de dernière minute dans le scénario?

« Non, on passe beaucoup de temps à travailler les scénarios des films de La Fête, et plusieurs collaborateurs donnent leurs impressions et leurs commentaires à chaque étape du développement. Une fois que le travail de préproduction commence, le ou la réalisatrice embarque dans le processus. C’est la même chose pour les acteurs. Si bien qu’une fois qu’on commence le tournage, le scénario a déjà été poussé à son plein potentiel. Donc, sauf pour quelques idées extraordinaires, on reste assez fidèle à ce qui est sur la page. »

Quels défis avez-vous rencontrés lors du tournage?

« C’est bien connu, plusieurs disent qu’il est très difficile de tourner avec des animaux et des enfants, mais nous, on adore ça !

Les enfants, c’est absolument génial de tourner avec eux. On essaie le plus possible d’avoir des plateaux de tournage super cool et très familiaux. On veut que ce soit amusant de tourner un film La Fête, et jusqu’ici, on réussit pas mal bien. Même Antoine Bertrand, qui a passé une grande partie de sa vie sur des plateaux de tournages, a dit à plusieurs reprises qu’il s'agissait de son plus beau tournage à vie !

Pour ce qui est des animaux, c’est une autre histoire (rires). Les animaux, c’est de loin, le plus gros défi de tournage. Sur Coco Ferme, on avait plus de 300 poules. Sur Mlle Bottine, on avait des mouffettes, des furets, des pigeons, un âne, des canards, des oies, un paon, des poules, un raton laveur, des cochons d’Inde... Bref, on avait beaucoup d’animaux et ils ne font jamais ce que tu veux (rires). C’est un gros défi à chaque fois, mais en même temps, ça fait partie de la magie. »

Comment avez-vous sélectionné les acteurs pour leurs rôles?

« On savait assez tôt dans le processus qu’on voulait Antoine Bertrand pour jouer Philippe. Le réalisateur du film, Yan Lanouette Turgeon, avait déjà travaillé avec lui dans le passé et avait beaucoup aimé. De notre côté, on aimait beaucoup qu’Antoine est non seulement un super bon acteur mais, qu’en plus, il est quelqu’un de très sensible et généreux : deux qualités très importantes quand tu tournes avec des enfants.

Marguerite, elle, c’est une véritable découverte. Pour chacun de nos films, on voit des centaines d’enfants par rôle afin de trouver la perle rare. André Melançon, qui avait réalisé Bach et Bottine et La Guerre des Tuques, disait souvent qu’il fallait chercher des enfants qui ressemblent au personnage, plutôt que de demander à des enfants de jouer un personnage. On essaie autant que possible de suivre cette directive, et Marguerite correspondait parfaitement à Simone, tant dans son énergie que dans sa personnalité. »

Les enfants-acteurs avaient-ils déjà une expérience au cinéma?

« Non, Marguerite avait un peu joué dans une série et pour Mathéo, qui joue Billy, c’était non seulement son premier rôle mais aussi sa première audition ! »

Quelle relation les enfants-acteurs avaient-ils avec les adultes sur le plateau?

« C’était absolument génial. On était comme une grande famille tissée serré. On a eu beaucoup de plaisir à faire ce film. Tout le monde était égal, tout le monde était important, et on avait tellement de fun ensemble que ça rendait le tournage très agréable. Souvent les enfants des techniciens et ou du réalisateur venaient même passer du temps avec nous sur le plateau de tournage. C’était vraiment le fun. »

Comment les acteurs se sont-ils préparés pour leurs personnages?

« C’était un beau défi pour Antoine de jouer Philippe Bloom, car ce personnage est très loin de sa personnalité. Antoine, on le sait, est un bon vivant qui aime les gens et le contact humain. Philippe Bloom, en revanche, souffre d’anxiété sociale et vit isolé du monde extérieur. Antoine a donc passé beaucoup de temps à échanger avec des personnes souffrant d’anxiété afin de bien comprendre leur état, et nous avons beaucoup appris sur cette condition pour construire le personnage de Philippe. Lors d’une représentation du film pendant la tournée, une jeune fille dans la salle a pris le microphone et a remercié Antoine en disant : « C’est la première fois que je vois un personnage au cinéma qui est comme moi, et ça m’inspire à m’ouvrir aux autres et à me laisser aimer. » C’était un moment très touchant pour nous et pour Antoine, qui a vu qu’il avait pu inspirer cette jeune fille à s’ouvrir aux autres et à surmonter sa propre anxiété.

Pour Marguerite, elle a travaillé de près avec Félixe Ross, reconnue comme la meilleure coach d’enfants au Québec. Félixe a accompagné de nombreux jeunes acteurs dans plusieurs films québécois. Elle est super bonne pour aider les enfants à comprendre le texte et le contexte de leurs scènes, à se connecter à eux-mêmes et à découvrir les émotions qu’ils ont en eux. Elle les aide à avoir accès à leurs émotions et à vivre les moments sans essayer de les jouer. »

Y a-t-il eu un « fou rire » mémorable pendant une scène?

« Oh oui, plusieurs ! Une fois on essayait de faire un plan où les portes de l’ascenseur de l’appartement de Philippe ouvraient sur la mouffette et Simone disaient « Qu’est-ce que tu fais là toi? » Pour que la mouffette reste au centre de l’ascenseur, on lui avait mis un morceau de poulet par terre. Alors les caméras roulent et le réalisateur dit « action » et, quand les portes de l’ascenseur ouvrent, il n'y a plus de poulet... et pas de mouffette non plus ! La seule chose qu’on voyait était une belle crotte (rires). La mouffette avait mangé le poulet, fait une crotte et était retournée se cacher dans le coin de l'ascenseur. »

Antoine Bertrand sur le plateau de tournage de Mlle Bottine au Cinéma Impérial

Antoine Bertrand sur le plateau de tournage de Mlle Bottine au Cinéma Impérial

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Quelle a été la scène préférée des acteurs à jouer?

« Marguerite a beaucoup aimé tourner la séquence à la foire avec les manèges. C’était une soirée complètement magique ! Je me souviens que chaque scène qu’on tournait de Simone et Philippe dans les manèges était empreinte d’émotions. On savait qu'on vivait un moment unique qui allait être très émouvant dans le film.

Pour Antoine, c’est la scène dans la pizzeria quand Marguerite lui demande pourquoi sa mère Evelyne l’a quittée pour aller vivre avec le frère de Philippe à la campagne. Philippe lui répond qu’elle pensait qu’il n’y avait pas suffisamment de place pour la musique et elle dans sa vie. À la fin de la scène, il lui dit « et c’est mieux ainsi, car sinon tu ne serais pas ici ». C’est à ce moment que Philippe réalise qu’il ne veut pas que Simone parte vivre dans une famille. C’est une très belle scène et c’est la préférée d’Antoine. »

Quelles mesures avez-vous prises pour que les enfants soient à l’aise pendant le tournage?

« On n’a pas eu besoin de prendre des mesures spéciales. Le plateau de tournage était un espace très familial et on était une équipe très proche alors les enfants étaient à l’aise partout. Parfois Marguerite et Mathéo étaient dans les loges, parfois dans les roulottes avec l’équipe de maquillage/coiffure, parfois sur le plateau pour regarder le tournage avec nous. Sinon, on mangeait tout le monde ensemble, c’était une belle vie la vie sur le plateau de Mlle Bottine. »

Comment avez-vous choisi les lieux de tournage?

« On voulait que le film ait un élément intemporel alors on voulait des localisations qui ne sont pas modernes ou trop uniques. On voulait aussi tourner dans le Vieux-Montréal pour créer un effet magique. »

Les décors étaient-ils construits ou avez-vous tourné dans des lieux réels?

« La maison de campagne était réelle, la bâtisse de l’appartement de Philippe est le Aldred dans le vieux Montréal. Vous pouvez d’ailleurs aller vous promener dans le lobby de cet édifice et voir les ascenseurs et le bureau de Régis, mais tout l’appartement de Philippe et les corridors ont été construits en studio chez Mels. Pour l’opéra, il nous a fallu trouver 4 localisations différentes pour faire les scènes, mais l’auditorium de l’opéra a été tourné au cinéma Impérial. »

Quels effets spéciaux avez-vous utilisés et quels secrets techniques avez-vous utilisés pour créer des illusions?

« Presque aucun ! Les seules choses qui ont été faites en effet spéciaux, ce sont les intégrations de la mouffette et de certains animaux tournées sur fond vert qu’on a ajouté dans les images en postproduction. Le problème est que certains de ces animaux ne peuvent pas être ensemble dans la même pièce car ils s’attaquent, donc il fallait les tourner séparément. Aussi, à la fin lors de la tempête, on a refait le ciel pour avoir des nuages plus sombres, mais sinon presque tout ce qu’on voit dans le film est vrai ! »

Combien de prises avez-vous dû faire pour certaines scènes compliquées?

« Beaucoup (rires), mais c’est surtout pour les animaux qu’on a fait beaucoup de prises. Marguerite et Antoine faisaient en moyenne quatre ou cinq prises et elles étaient toutes bonnes. »

Y a-t-il eu des scènes coupées qui ne sont pas dans le film final?

« Non, toutes les scènes du scénario sont dans le film. Elles sont toutes importantes et chaque scène amène un élément important au développement et à la courbe des personnages. »

Si vous pouviez changer une chose dans l’histoire, que changeriez-vous?

« Rien ! On aime beaucoup le film et chaque moment de l’histoire. Idéalement, s'il y a quelque chose que tu veux changer dans l’histoire, ça devrait être fait pendant l’écriture. On a enlevé et modifié beaucoup de scènes pendant l’écriture, mais une fois qu’on avait un scénario fini, on n’a plus toucher à rien. »

Y a-t-il une leçon importante que les spectateurs peuvent retenir après avoir vu le film?

« Oui : que c’est important d’aimer et de se laisser aimer, même si on a été blessé dans le passé ! Parce que la vie nous donne parfois une deuxième chance… »

Ne manquez pas l’opportunité de voir Mlle Bottine, en salle depuis le 29 novembre.

Publié le 28 nov. 2024 | Mis à jour le 4 déc. 2024